Coup de tête : Le Dîner de cons
« C’est l’histoire d’un mec » privée
de Coluche, remplie de baudruches…
Sans atteindre la tension d’un
spécialiste appelé Maurice Pialat, qui lui-même ensuite réalisera une autre
mémorable scène de repas, vers À nos amours (1983) je vous renvoie,
Jean-Jacques Annaud ne démérite pas, loin de là. Moins muette et moralisatrice
que son homologue de The Square (Ruben Östlund, 2017),
l’humiliation en réunion, tel le viol d’accusation, direction la prison, de Coup de tête (1979) coupe autant l’appétit, craque encore le joli vernis.
Pas de Zinedine Zidane à l’horizon, pas de main divinisée à la Diego Maradona décédé,
qu’importe, puisque Patrick Dewaere sait cependant y faire, afin de terroriser
les discutables notables attablés, atterrés. Bien éclairé par le fidèle DP
Claude Agostini, adoubez les bougies bicolores un brin à la Barry
Lyndon (Stanley Kubrick, 1975), bientôt au boulot sur Les
Compères (1983) de Francis Veber ; bien écrit par ce dernier
documenté ; bien monté par Noëlle Boisson, assembleuse césarisée pour L’Ours
(1988) et Deux frères (2004), par ailleurs partenaire de son compagnon
Jacques Doillon, collaboratrice de Georges Lautner (La Valise, 1973), Patrice
Leconte (Les Bronzés, 1978), Michael Cimino (L’Année du dragon, 1985)
ou Claude Berri (Jean de Florette, 1986), le moment devient vite menaçant,
amusant, filmé avec une discrète virtuosité. Cinéaste dispensable mais doté de
sincérité, aux opus spectaculaires,
publicitaires, pourvus d’une certaine originalité, (re)pensons par exemple à La
Guerre du feu (1981), au Nom de la rose (1986), à L’Ours
ou à L’Amant
(1992), accessoirement admirateur du cinéma national d’avant-guerre, Annaud accomplit
ici un petit massacre en société, de bancal banquet.
Sa caméra modeste, à la fois fixe et
mobile, ses cadres précis, ses gros plans associés aux plans d’ensemble, son
rythme dynamique, parviennent à servir, sinon à immortaliser, de la meilleure
des façons – de marcher, rajoute Claude Miller – un casting choral impeccable, mentions spéciales au suave Jean Bouise, au silence éloquent de Corinne Marchand, au marrant Robert Dalban, en
train de se marrer en aparté, à Gérard Hernandez en remis en place policier, à
chevalière very vénère. Porteur d’un
improbable t-shirt parme, l’acteur
majeur transcende de son côté une satire sociale disons datée, un peu poussive,
un peu inoffensive, en définitive très éloignée de la dramatique et classée comédie
à l’italienne ou de la vénéneuse veine chabrolienne. L’auteur de Sa
Majesté Minor (2007), de Louis-Lumière sorti major, par la suite passé par l’IDHEC, chouette, maîtrise sa technique,
remarquez la mise au point millimétrée lorsque se lève le trouble-fête, le
véritable agresseur aussitôt délaissé en faveur du défait président/PDG. Après
un contrechamp sur Mademoiselle Marchand, épouse espiègle, Annaud achève la
scène via les conséquences de
l’offense, sorte de second acte pas patraque, à serveur sidéré, en costard
immaculé, à gifle de flic. « Simone, on rentre », en effet,
c’est-à-dire on retourne (mal) dormir dans cette France d’enfance, assez rance,
où l’économique côtoie, tutoie, le politique, voire l’inverse, où le foot (les) rend (tous) fou(s), où la
célébrité rend apeuré. Fable affable sur la lâcheté partagée, du ressentiment
la stérilité, Coup de tête se caractérise en outre par son romantisme in extremis, corrigeant l’outrage sexué,
désolant, récurrent parmi l’imagerie du ciné des seventies, possible réponse problématique au féminisme actif, par sa
mélancolie en mineur, en douceur, avec justesse saisie par le léger sifflet
(d’arbitre) de Pierre Bachelet.
Il s’agit, en résumé, d’un ouvrage qui esquive la vengeance et dont la réussite, à l’instar du ballon rond la pratique, s’avère en vérité collective, estimable travail d’équipe cristallisé par la séquence présentée, CQFD.
Un Fauve
RépondreSupprimerDe Enguerrand Guepy
https://books.google.fr/books/about/Un_Fauve.html?id=3osgDQAAQBAJ&printsec=frontcover&source=kp_read_button&redir_esc=y#v=onepage&q&f=false
https://www.youtube.com/watch?v=qqC9fFoA3g8&t=101s
SupprimerPatrick Dewaere et Marie Trintignant (1979)
Supprimerhttps://www.youtube.com/watch?v=O_L4de0p6DU
Cannes, encore :
Supprimerhttps://www.youtube.com/watch?v=B_TgnpQCJ9Q&t=58s