Big Legend : Bigfoot et les Henderson
Cryptozoologie ? Claire connerie. Sasquatch movie ? Téléfilm du jeudi.
L’esprit de sérieux produit du
risible ; dernière victime en date, cette historiette à sornettes. On y
trouve un instant hilarant, quand le survivant appelle son adversaire à l’aide
d’un… klaxon, ducon. Portée par un
acteur (et co-producteur) méconnu, qui méritait de le rester, nommé Kevin Makely,
issu de la TV, l’œuvre dévie vite vers le dérisoire et le dispensable, dès son
prologue d’un quart d’heure, sentimental et forestier, ralenti de publicité
sucrée inclus. À peine demandée en mariage, au chaud dans son sac de couchage,
la photographe disparaît, car le cousin du yéti adore les Natalie, eh oui.
Après un an passé au sein d’un asile, le veuf vénère retourne un moment chez sa
maman, Adrienne Barbeau en caméo presque émouvant, ou payeur d’impôts. Il « veut
des réponses », il ne croit pas une seconde à l’ours rassurant de la psychologue,
il avise illico sur une photo de la
défunte une silhouette troublante. Muni d’un gros couteau à la Rambo, d’un revolver aux balles peut-être en argent,
le voici à nouveau au milieu des bois, aux abois, endormi dans sa bagnole qui
s’affole. Le monstre bipède bousille son pare-brise et sa portière puis part
prendre l’air. Heureusement, Tyler ne manque pas de compagnie, se découvre un
ami en la personne d’un braconnier entiché de « chef ». Si celui-ci
rappelle Richard Dreyfuss, notre héros se la joue Robert De Niro relooké par
Cimino (Voyage au bout de l’enfer, 1978). Bien sûr, il ne s’intéresse
pas à la chasse au cerf, il traque le ravisseur en série, velu, invisible, sur
un terrain privé, appartenant à la Xylon Incorporated, sur un périmètre naguère
délimité par les Chinooks. Pas d’Amérindiens en vue, juste la bague fatale,
dégotée au milieu d’un bourbier ensanglanté, infesté de mouches par un sound designer malicieux.
Rassurons le lecteur, résumons la
trame anémiée : Tyler fout la pâtée au prédateur de malheur, à coup de
hache, de flingue, de gaz et de lance enflammée, olé. La pauvre créature se
carapate derrière les arbres, sans doute pour clamser sur un tapis enneigé, amen. Pendant l’épilogue hospitalier, bissez
la boucle bouclée, une doublure d’Olivia Wilde introduit in extremis un Lance
Henriksen déguisé en professeur Xavier, pardon, en Jackson Wells à la voix
caverneuse. Le type paraît avoir trop lu Stephen King, il parle de voiture, de
placard, de ce qui gît sous le lit et recrute pour son équipe, pour la
vraie-fausse suite, sobrement intitulée The Monster Chronicles, hâte de les
parcourir, jusqu’à en périr, la nuit, d’ennui. Tourné en Red, tournant en rond,
cadré en Scope, en caméra parfois portée, Big Legend (2018), tout sauf grand
film, ne possède absolument rien de légendaire et comporte pourtant l’une des
meilleures répliques entendues en ligne cet été, prononcée par le justicier à
proximité de sa belle bannière étoilée – « Burn, you son of a
bitch! ». Certes supérieur, quel honneur, au similaire et calamiteux Backcountry
(MacDonald, 2014), l’opus de Justin
Lee évoque le souvenir involontaire de The End (Nicloux, 2016). Les mecs et
les clairières, ça commence à bien faire, à ne plus satisfaire. On conseillera
par conséquent au spectateur, même clément, même meilleur pêcheur que le ranger, de (re)lire Simetierre, où figure un
refroidissant wendigo, registre tribal du survival
oblige. Sinon, recommandons un texte assez récent, publié-miroité, consacré à
la nature comme sépulture. Ultime option de saison, éteindre son PC, cesser de
ricaner, ne pas désespérer du cinéma contemporain, genré ou point, et partir rechercher
un simulacre de fraîcheur, ici, ailleurs.
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