Les Âmes mortes

 

 « Romantisme et pornographie », Rousseau et neurasthénie, « chagrin et destin »…

Au lecteur amateur des opus précédents, Sérotonine semble fissa familier, suscite aussitôt une sensation de déjà-lu. Un écrivain (ré)écrirait en définitive un seul et unique livre ? Peut-être, possible, pourtant il ne s’agit ici, en aucun cas, crois-moi, d’une quelconque compilation à la con. Sérotonine ainsi ne se réduit à – classement chronologique – la somme tissée en patchwork de Extension du domaine de la lutte, Les Particules élémentaires, Plateforme, La Possibilité d’une île, La Carte et le Territoire, Soumission, dépasse l’addition, excède la contextualisation. Amusant, émouvant, jamais déprimant, toujours stimulant, ce roman carbure donc à l’hormone, à l’homme, in extremis au cortisol excessif. Affligé d’un affligeant et improbable prénom composé, classé un peu beaucoup « pédé », Florent-Claude se souvient de sa vie, au complice « attentif » – vous, nous – en délivre le récit dépressif, en dresse le bilan bien peu brillant, se donne moins de dix ans, les charges, quelle charge, à vite te ratiboiser ton paternel héritage, avant de se défenestrer in fine, coda de quartier chinois, calcul inclus. Pour l’instant, cette chute à la Camus non encore advenue, (re)voici les femmes de sa vie, Claire l’actrice, Kate l’humanitaire, Camille la vétérinaire, Yuzu « l’araignée », la « compatissante » Audrey. En écho à Valérie Damidot, voire à Nicolas Bardo (Femme fatale, De Palma, 2002) FC, toutes ses amarres larguées, lui-même idem, ne renonce à relooker son studio d’immeuble immaculé, à se construire à domicile, grâce aux impressions en série, un émule du « mur Facebook ». Banderas en photographe capturait l’éclair au creux du verre, accomplissait le puzzle pareillement parisien d’une fille au final sauvée, aux diams dérobés, à la baignoire embrumée. Notre narrateur observateur, pas sauveur, croit au Christ, non à la rédemption, il (se) fait peur en sniper, fi d’infanticide, ouf, il démasque mais ne dénonce un voisin pédophile, Allemand misanthrope et vidéaste médiocre, il échoue, surtout, à réconforter l’ami divorcé, « salope » de Céline, la Londonienne, pas Louis-Ferdinand, adieu l’agriculture, adieu l’aristocratie, adieu la survie, aussi, suicide au gros calibre, sur autoroute sans entourloupe, un « caméraman de BFM » cadre la scène obscène, CRS normands massacrant le « malaise paysan », Jacquou le Croquant n’en réclamait pas tant. Ce passage remarquable, le meilleur du livre, avec les pages consacrées à Camille, fifille de Portugais capable de prodiguer une fellation en forêt, photographiée, les féministes font grise mine, selon une « concentration » comme incarnation du « don », « pureté des traits » empruntée à la prière de naguère, assassine et immortalise la figure tendre et tragique d’Aymeric, met de même un terme à l’adolescence, à « l’insouciance », aux Doors & Deep Purple, aux idéaux translucides et à la « poésie » poignante des « chattes humides ». La Montagne sacrée, Le Temps retrouvé, FC les perçoit en tant que requiem culturels, civilisationnels, défaite de l’intellect, vive la jeunesse, la beauté, CQFD. Aux autres, au doc Azote, aux perdants et impuissants de maintenant, il reste des ruines, une touriste angélique, des « marionnettes européennes », l’amour et le désamour, la disparition, la solitude, l’hôtel, la bouteille, l’Agro & Monsanto, la DRAF et la Confédération paysanne, la mort, les âmes, la mort dans et de l’âme, les âmes mortes de Gogol et les nôtres, sous médoc ad hoc, miroitées, (con)damnées.       

Commentaires

  1. Question de soumission et de Gogol...SOUS CONTROLE - Court-Métrage
    Ecrit, produit et réalisé par Cédric Zaroukian . Avec Sandra Madly, Paul Perré, Guillaume Gascoin.
    https://www.youtube.com/watch?v=nyFqcS-aDjo

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    Réponses
    1. Merci de ceci, sourire garanti, priorité/propriété à peine poussée...
      Schubert, bis :
      https://www.youtube.com/watch?v=8V_TXNdn5ss
      Autre Gogol :
      https://www.youtube.com/watch?v=urIJ2gFmTw8

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