Husbands + Stand by Me

 

Deux métrages, deux images : Le Plein de super (1976) + Un étrange voyage (1981)

Cavalier au carré, un cadavre au départ, un autre à l’arrivée. Huit années après le dispensable La Chamade (1968), repêché par Deneuve & Piccoli, le revoici, sur la route et surtout la déroute. Item d’autoroute et film de voie ferrée, leur générique remercie les sociétés concernées, bien sûr la SNCF, Le Plein de super + Un étrange voyage bénéficient de financiers célèbres et désargentés, à savoir Danièle Delorme & Yves Robert, d’un dirlo photo de valeur et parfois acteur, cf. son commissaire, Jean-François Robin (Les Bronzés, Leconte, 1978 ou L’Amour braque, Żuławski, 1985) le valait bien, de scénarios signés à huit ou quatre mains, la création donc à l’unisson de la fiction. S’ils frisent l’autobiographie, le vécu revisité, voire fantasmé, les métrages d’un autre âge, moitié d’une décennie censée être libérée, en réalité déjà libéralisée, pas seulement en matière de sexualité, premiers signes du proche mitterandisme, « révolution socialiste » à écouter l’oreille collée sur le rail, « tu dérailles », s’avèrent vite un tandem de ratages non démuni d’une poignée de qualités. Handicapé par des trames transparentes, peu consistantes, assez languissantes, ponctué de caméos plus ou moins rigolos, énumérons les noms de Mesdames Agenin, épouse épuisée, Baye, maîtresse magnanime, de Messieurs Besnehard, amoureux malheureux, Berléand, mendiant de renseignement, Métayer, voyou relou, le diptyque manque de rythme, verse vers le statique, périples immobiles qui rêveraient de carburer à l’amitié, à la paternité, exit la « culpabilité », fi de « parapsychologie ». Cavalier choisit de filmer des visages davantage que des paysages, même si Un étrange voyage possède plus d’air, se passe plus en plein air, que Un plein de super, pourquoi pas, mais ainsi il évide, évite, l’environnement, le contexte, l’horizon, le réduit à un rapport de classes d’occase, marxisme d’Argus, à une ruralité d’altérité, en bleu de travail, (in)digne de la planète Mars. Le générationnel aux oubliettes, le politique cantonné au périphérique, de la Capitale, du Capital, il reste des histoires de mecs, à raconter, à se raconter, un deuil de fils à effectuer, flanqué d’une fifille boulimique et frigorifique, la future énarque patraque « dégueule le monde » immonde, amen, « marchand », tu m’en diras tant. Propre progéniture du cinéaste fugace, Camille de Casabianca se révèle une actrice et une scénariste exécrable, tandis que la pas si belle équipe de types puérils et pathétiques, cogités puis incarnés par Bouchitey, Chicot, Crombey, Saint-Macary, macère dans sa médiocrité, n’enthousiasme jamais. Le Plein de super effarera, n’en doutons pas, les féministes d’aujourd’hui, confirmera leur effroi, leur myopie de misandrie, mention spéciale à la conversation à la con à propos des sexuelles et sexistes positions, à la coda collective, œcuménique, projection, au creux du nocturne compartiment, d’un amical gang bang de fécondation, allons bon. Un étrange voyage congédie le mélodrame, se risque au risible, crie dans le vide, additionne les tunnels de métaphore à la truelle. Ni Cassavetes (ou Pialat) ni Reiner (& King), l’appliqué Cavalier délivre en définitive des odyssées anecdotiques, des opus point picaresques, où surnagent une sensation de liberté éphémère, mortifère, la douleur ravalée, au propre, au figuré, du fragile et fort Rochefort. En étau entre les réussites du Combat dans l’île (1962), L’Insoumis (1964), Thérèse (1986), ces dérives sincères et superficielles témoignent itou d’une méthode ad hoc.            

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