Sac de nœuds


Un métrage, une image : Lucky Strike (2020)


Fumer nuirait à la santé, mais à vouloir acheter sa marque préférée, porte-bonheur puéril, on se fait courser, renverser, mais à devoir enfumer son petit monde immonde, on observe, désespéré, sa maison en train de « partir en fumée », en effet. Magnanime, consolante, la maman incontinente, redoutable, remémore au voleur amateur, menteur, papounet paupérisé de fifille financée, exilée à l’université, que durant la « guerre de Corée », toute la ville brûlait… Premier opus impersonnel, superficiel, signé du cinéaste-scénariste Kim Yong-hoon, Lucky Strike se moque des célèbres cigarettes, de ses silhouettes suspectes, du « coup de pot » d’argot de VO. Il entrecroise les parcours sans amour, il remonte la chronologie, démonte la combine machiavélique, il découvre dès le début, à qui sait suivre les faits divers de la TV, le faisceau trafiqué des suivantes, simultanées destinées. Au whodunit occidental se substitue ainsi un who will have it doublement asiatique, puisque adaptation d’un polar nippon. Découpé en chapitres, ce spectacle assez divertissant, bien sûr satirique, un brin arythmique, répond à sa façon aux accusations de misogynie adressées ici à la sud-coréenne cinématographie : une femme y découpe une autre femme, dommage pour la supposée solidarité sexuée, pour l’identique requin tatoué, pour l’altruisme très intéressé. Perdue parmi des hommes immatures, médiocres, machistes, mention spéciale au mari minable, tabasseur d’épouse au sol, fissa comploteuse, détrompée, démembrée, l’ex-tenancière du bar à hôtesses, prédatrice supérieure, femme fatale infernale, surclasse, sinon massacre, l’ensemble, semble presque sur le point de s’en sortir, de récupérer in fine le fameux magot molto macabre, hélas rattrapée in extremis, disons harponnée dans la cuisse, toilettes touristiques, par sa cannibale némésis. Dix ans après The Housemaid (Im Sang-soo), Jeon Do-yeon prête sa beauté, son talent, à cette sorte d’Arlésienne sereine, homicide, féminicide, figure irrésistible de cynisme suprême. Au terme du manège, une troisième femme, dite de ménage, de l’employé remercié de sauna en pleurs supra, unique héroïne éthique, hérite du fric inique, morale moralité d’un métrage davantage mineur que marxiste.

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