MaXXXine
Un métrage, une image : Antrum (2018)
La tente, l’attente, une forêt, des
affolés, un opus posthume ou présumé « mortel » :
moins malin que le tandem américain Myrick
& Sánchez, le canadien Amito & Laicini séduit à demi. Plus méconnu,
aussi indie, que le fameux et
inoffensif Projet Blair Witch (1999), Antrum (re)connaît ses classiques,
s’amorce selon un montage des ouvrages de Christensen, De Liguoro &
Padovan, Méliès, démonologues du muet via
votre serviteur ailleurs miroités. Encadré d’un documenteur dispensable et un
peu racoleur, marketing malhabile
muni d’une philosophie riquiqui sur le pouvoir mouroir de la peur, Antrum
se met ainsi en abyme, associe sorcellerie et survie, trivial et fatal. S’il se
situe au sein malsain du ciné spécialisé des seventies, en possède en partie le radical réalisme, l’essai réussi
à moitié s’autorise à être réflexif, à carburer à la consolation et à la
catharsis. Le conte pas con fait illico
écho à Cujo (Teague, 1983), à Délivrance (Boorman, 1972), ne se
soucie de Suspiria (Argento, 1977), pratique in extremis une
auto-analyse, « sigils » en prime. Le vrai-faux found footage se tisse au
snuff movie, les « battements binauraux » adoubent les images
subliminales, alors qu’Astaroth, le diable l’emporte, se substitue à l’infect
et enflammé Baphomet, au pénis impressionnant à Pazuzu emprunté (L’Exorciste,
Friedkin, 1973), ici transformé en barbecue relou, propice à cuire un
Asiatique suicidaire et un blondinet dessillé. Lesté d’un soupçon d’humour
noirissime, cf. le pop-corn
assaisonné au LSD, le carton d’introduction, disclaimer juridique et drolatique, le cannibale en slibard, à
binocles et à cornes, Antrum n’amusera les amoureux des
animaux, puisque euthanasie inaugurale de chienne « méchante », sinon
infernale, puisque cerf décédé sodomisé par le pervers précité. Quant aux
lecteurs épris de l’inspiré La Conspiration des ténèbres, aka Flicker, cinéphile et roboratif thriller signé Theodore Roszak, ils
resteront sur leur faim, passeront leur chemin, méta patatras. Oralee voulait
sauver Nathan, l’émanciper de ses cauchemars, organiser in situ une mise en scène
non maléfique mais œcuménique et thérapeutique, travail de deuil sans cercueil,
sorte de grosse tombe à creuser, « strates » et « porte de
l’Enfer », gaffe à Cerbère, à dégoter. Hélas, la grande sœur et le petit
frère, pris au piège d’un espace circulaire, comme chez Carpenter (L’Antre
de
la folie, 1994), passagers naufragés d’une barque patraque, de roseaux
guère rigolos, style The African Queen (Huston, 1951),
doivent descendre une paire de types patibulaires, en sus d’un incube un brin
lynchien, puisque planqué à proximité d’une poubelle de resto de malheur, plus
du cœur, amitiés à Mulholland Drive (2001). Antrum se termine sur un
possible infanticide, l’insanité d’une esseulée, d’une meurtrière stressée,
cinglée, la déréliction d’une malédiction de saison, d’occasion, CQFD
désenchanté d’une famille morbide, en rime à celle du Simetierre de Stephen
King. Tandis que les diableries ne sauraient exister, les « âmes »
ressusciter, revenir depuis l’autre côté, le mal (le mâle) sévit, horrible et
risible, les bonnes intentions orientent vers l’oraison, le gimmick cinématographique s’avère en
définitive mélodramatique. En dépit de ses limites, narratives davantage
qu’économiques, Antrum mon salut mesuré mérite. Il bénéficie en effet du beau
boulot du dirlo photo Maksymilian Milczarczyk et du duo Rowan Smyth & Nicole
Tompkins, il dispose d’une berceuse mimi à la Rosemary’s Baby
(Polanski, 1968), il cite Ring (Nakata, 1998) + Cigarette
Burns (Carpenter bis, sacré
encore Master of Horror), il évoque
un village de(s) damnés « français » aux enfants sacrifiés. N’en
déplaise à la chouette marionnette suspecte d’un écureuil, Nathan, vivant revenant, détache un
canidé noir et blanc, acte altruiste et symbolique, Oralee ne se libère de sa
nuit, trop tôt vieillie, émouvante ennemie...
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