Un drôle de paroissien : La Part des anges
Si l’habit ne fait le moine, le regard transforme le monde…
Mocky jamais ne se moqua de la foi,
sans cesse de son commerce, avec évidemment l’acmé du Miraculé (1987). Mocky
& Moury, co-scénariste attitré, signataire aussi de L’Affaire d’une nuit (Verneuil,
1960), transposent ici, en sa compagnie, un bouquin de Michel Servin, à
l’intitulé latin : Deo gratias. Mocky confie le
montage de ses images à Marguerite Renoir, qui travailla sur Snobs !
(1962), qui travaillera sur La Grande Frousse/La
Cité de l’indicible peur (1964). Quant à la musique, rieuse ou
religieuse, voilà Kosma. Dans Un drôle de paroissien (1963), on
aperçoit le copain Jean Poiret, la compagne Véronique Nordey, on voit surtout
Bourvil, acteur complice et docile, sans doute surpris du succès d’un film
qu’il aida à financer, sans doute reconnaissant du (rem)placement (de Fernandel),
dû à un certain Gabin. Face à l’aristocrate paresseux, dépossédé, pas à court
d’idées, d’abord brebis égarée, ensuite pécheur racheté, Francis Blanche se
déguise en policier spécialisé, adepte justement du déguisement, juste avant de
connaître la consécration, en tout cas le culte laïc, à l’occasion des Tontons
flingueurs
(Lautner, 1963), d’incarner un client inquiétant de Belle de jour (Buñuel,
1967), de concocter les dialogues de La Grande Bouffe (Ferreri, 1970),
ouf. En découvrant la séquence suivante, on redécouvre la valeur d’un grand
chef opérateur, à savoir celle de Léonce-Henri Burel, né au siècle dernier,
précédant de trois ans l’invention officielle du ciné, collaborateur très
éclairé, durant cinq décennies, eh oui, de mecs du calibre de Gance, Antoine,
Feyder, L’Herbier, Dréville ou Decoin, parce qu’il le valait bien. En 1963, il
sort de Procès de Jeanne d’Arc (Bresson, 1962), il va participer à Chair de poule (Duvivier,
1963) ; au registre église, signalons en sus Le Journal d’un curé de campagne
(Bresson, 1950), certes moins amusant, à forte tendance de
« cinématographe ».
Après Les Vierges (1962), à la
photographie dirigée par Eugen Schüfftan, le DP de La Tête contre les murs
(Franju, 1958), jadis de Metropolis (Lang, 1927), Drôle
de drame (Carné, 1937) ou C’est arrivé demain (Clair, 1944), Un
drôle de paroissien à nouveau se souvient de l’expressionnisme, du film
noir, de leur « atmosphère, atmosphère », merci, Arletty (Hôtel
du Nord, Carné, 1938, photographié par Armand Thirard), de cauchemar.
Mocky pratique ainsi l’art du contraste, du clair-obscur, du low key,
tout ceci souligne l’ambivalence du personnage de Bourvil, infuse un filigrane
fantastique, plus tard exploré en couleurs au moment de Litan (1982), parvient à
créer sa propre beauté, séduction scopique et graphique des lignes, des
figures, de l’architecture, de la structure. Cadrée au cordeau, délestée de
désinvolture, la rencontre entre l’escroc et le flic rappelle le duel de Welles
& Robinson dans Le Criminel (Welles, 1946). Il s’agit bel et bien, au-delà d’un
instant de divertissement stimulant, élégant, d’un affrontement moral, d’une
question éthique et cinématographique, d’une leçon de réalisation et non d’un
ecclésiastique sermon. Mocky fait dialoguer à distance deux groupes, celui des
gosses, celui des sœurs, de manière rapprochée, deux individus similaires et
différenciés, « concurrents », par conséquent, pas au sens,
cependant, où le voleur l’entend. Tandis que résonne sur la bande-son la douce
succion de l’aspirateur portatif, doté d’un « moteur à rotor
imprimé », une ombre murale nous ramène à M le maudit (Lang, 1931),
pardi, une patte se pose sur l’épaule du pilleur pris non plus la main dans le
sac mais au creux du tronc, allons bon. Modèle d’ironie aux sous-entendus
classés X (« orifice simple et large », « suceuse à
sous »), en présage de l’affiche explicite, retoquée par la RATP, des Saisons
du plaisir (1987), la scène s’autorise au plan-séquence, au bref travelling de triolisme, à une
composition à l’unisson, chaque plan porte, importe, du passage de la pénombre
intérieure à la luminosité extérieure remarquez-appréciez le choc, aux
perspectives inversées, dehors, dedans, en profondeur de champ.
Émule adulte du Petit Poucet, Lachaunaye sème sa monnaie d’aumône à de « petits polissons » afin de semer un assaillant en noir et blanc, s’engouffre illico au fond d’un métro de capitale hivernale davantage que de pierre tombale. Au-dessus, à la surface et en surface, il faut donner le change, faire marche arrière, succomber au cortège à contresens, chœur prometteur en prime. Moins « mou » que le « caramel », plus difficile à pincer que la « pince articulée » parfois utilisée, le détrousseur astucieux, insaisissable, file façon Orphée. Peut-être croisera-t-il, qui sait, Le Samouraï (1967) idem souterrain de Delon & Melville, sept ans avant que l’austère Jean-Pierre, au générique clinique, ne décide de redonner à André son prénom d’état civil, Bourvil, désormais de l’autre côté de la loi, réinventé via Le Cercle rouge (1970) et rebaptisé, sympathique surprise, du patronyme de l’auteur de ces lignes…
"Mais, encore un coup, Dieu bon, illuminez-les, Mes frères aveuglés!
RépondreSupprimer(Verlaine, Œuvres posthumes., t. 2, Qq. vers inédits., 1896)
Mocky :« Le Miraculé est le seul film critique fait sur Lourdes. Je ne critique pas la foi, je comprends les gens qui ont la foi pour garder l'espoir, mais je critique les marchands du temple. […] À l'époque (1987, NDLR), le Front national avait arraché les affiches, mais ça n'a pas empêché le film d'avoir du succès. Les vrais catholiques, qui ont un discernement, ont aimé le film. »
L huissier film 1991 de Pierre Tchernia avec Michel Serrault, Daniel Prévost, Georges Wilson
https://www.youtube.com/watch?v=dnch10mCEhI&list=LL&index=4
https://www.youtube.com/watch?v=Mi_Lf4Jf9W0
Supprimerhttps://www.youtube.com/watch?v=Pc7E9Bh6DA4
https://www.youtube.com/watch?v=RCwQ8M11S-8
https://lemiroirdesfantomes.blogspot.com/2021/05/un-film-une-ligne.html
"De gré ou de force - Téléfilm" : dans la vraie vie j'ai assisté à la déchéance physique et intellectuelle d'un ami employé cadre sup dans une grande banque française, mis au placard suite à la crise de 2008, il a tenu treize ans moyennant une maladie auto-immune carabinée et vieilli de plus de dix ans, maintenant avec la "covidsinistrose "on a le "process" en version planétaire, malheur aux faibles, aux vieux c'est à dire aux plus de soixante ans, aux pauvres, aux récalcitrants de la shooteuse.. une époque "formidiable"
SupprimerLa Grande Frousse (1964) Bourvil, Francis Blanche, à revoir si le coeur vous en dit, un petit Mocky
RépondreSupprimerc'est toujours fantastique !
https://www.youtube.com/watch?v=BR84Q7p1t1o
http://lemiroirdesfantomes.blogspot.com/2021/12/la-belle-et-la-bete.html
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