Love & Mercy : Le Kid de la plage


Bill Pohlad, un producteur (de films) derrière l’objectif ? Pourquoi pas, mais certainement pas comme cela, selon cette exsangue « évocation », fausse du premier au dernier plan…


Il conviendrait de projeter (de plutôt jeter à la poubelle) ce « téléfilm » dans toutes les (discutables) écoles de cinéma, pour bien démontrer ce qu’il ne faut pas faire en la matière, à quel point le vocable réalisateur s’avère surfait, usurpé, dévalorisé (Welles s’en plaignait déjà).

La « critique » (internationale), cette pénible profession de professionnels de la « petite phrase »ne sort guère grandie du désastre, son ravissement confinant à la confusion (admirative) entre le « matériau » et le résultat, à la crétinerie (dithyrambique), voire à la surdité (audiovisuelle).




Avec ses « reconstitutions » de sessions en studio (renvoyons les amnésiques vers Godard, hiératique, réflexif, enregistrant la « sympathie diabolique » des Stones au sein de One + One) singées en play-back et torchées en 16 mm façon « documentaire » (caméra portée, surdécoupage, zooms intempestifs) ; avec sa structure scolaire et grossière (deux époques, deux acteurs, deux états d’esprit pour une même « maladie mentale » in fine rediagnostiquée) ; avec son poli vintage (aucune contextualisation historique) et son absence de la moindre « musicalité », cet interminable psychodrame entend capturer la (mystérieuse, faramineuse) magie (à travers sa genèse) de Pet Sounds – un chef-d’œuvre « familier », en effet, cependant inouï, aussi, d’une richesse mélodique, harmonique, instrumentale et verbale sidérante, intemporelle, au point de survivre ici à son tronçonnage de principe, accessoirement, l’un des meilleurs albums de « musique populaire », ainsi que la qualifient ceux qui la détestent, au côté du What’s Going On de Marvin Gaye, du Berlin de Lou Reed, du The Sensual World de Kate Bush, trois titres en forme de sommet parmi quelques autres –, explorer la psyché « perturbée » de Brian Wilson (l’inspiration, divine ou non, réduite à la schizophrénie, le talent assorti à une sorte d’autisme social, familial, la beauté enracinée à un traumatisme paternel étiqueté désormais « maltraitance »), raconter une histoire d’amour et de rédemption (Elizabeth Banks, solaire, juste et tendre dans son avatar de soap à la mode 80, en butte à un « psychiatre manipulateur bon pour l’asile », une pure invention scénaristique, voyons, ces êtres-là n’existent pas dans la « réalité », joué par un Paul Giamatti assez creux/exagéré).


Il échoue partout, intégralement (bruit de couverts amplifié à faire hurler de rire le Hitchcock de Chantage, précis de virtuosité sonore « coupée au COUTEAU »), lamentablement (symbolisme carcéral des rayures sur les costumes des « garçons de la plage », Dano & Cusack, « lunaire » ou grimaçant, un œil sur la liste des Oscars afin d’y repérer leurs noms, puisque cette « institution » raffole de ce type de performances « différentes »), interminablement (les dispensables suppléments, vil exercice marketing à base d’autosatisfaction et de congratulations générales, « repassent une couche » hagiographique durant quarante-cinq longues minutes).

Le grand (si brillant, même si son SMiLE, la « suite impossible », différée en décennies, du précédent opus, ne nous séduit que par éclats) Brian, pas rancunier, malgré sa promotion en « génie » asexué, au final moins dédoublé que son homonyme chez Poe, approuve du bout des lèvres cette sinistre (martelée « sincère », so what ?) entreprise, sa Melinda salvatrice transformée en VRP, le dernier mot, en chanson éponyme, lui revenant (« récent » concert) au fil du générique final, le couplet liminaire doté d’une ironique et délectable lucidité : I was sittin in a crummy movie/With my hands on my chin/All the violence that occurs/Seems like we never win – peu de violence, sinon celle faite au spectateur et au « sujet », dans ce traitement caricaturalement hollywoodien, mais un « film minable », en vérité, inutile, insipide, sourd et aveugle.    
      

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