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Affichage des articles du octobre, 2024

Mange ta mort

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  Exils # 58 (24/10/2024) Epstein & Corman ? Watson & Webber. Diptyque 28, duo de Poe. Ne parlons du compatriote ni de Roger l’Amerloque. Deux items homonymes, inscrits au fameux Registre National du Film. Catalogue de camelote, de classiques, cabinet de curiosités, de succès, hébergé à la Bibliothèque du Congrès. Dressé depuis trente-cinq années, occupation de « professionnels de la profession », multiples spécialistes, du public en partie. Comme dans l’Hexagone, dix ans d’existence et vous voici classé d’office, fi du box-office , en « cinéma de patrimoine ». Des critères « culturels, esthétiques et historiques », au compteur presque 880 titres, toutefois pas un seul fiché X, vade retro  Damiano. Tout ceci riquiqui, en quantité, sinon ancienneté, à côté des collections mesurées en milliers de la Cinémathèque de Langlois Henri (40 000), des Archives (Françaises) du Film à Bois-d’Arcy (140 000). Pris de court par celui de l’améric...

Devine qui vient damner

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  Exils # 57 (21/10/2024) « La caméra ne ment pas » : il faut avoir foi dans le cinéma afin de proférer pareil aphorisme, a priori risible lorsque l’on songe aux mille et un mensonges des images animées depuis bientôt cent trente années, sur grand puis petit écran. Sans doute sans le savoir, cela renvoie vers Godard, le fameux acte de foi du Petit Soldat (1963) : « La photographie c’est la vérité. Et le cinéma c’est vingt-quatre fois la vérité par seconde. » Mais nul mépris ici, ni d’une commerciale imagerie, ni du public mis en abyme. Cette surprise sympathique à succès critique, acclamée par Stephen King & Kevin Smith, délaisse à d’autres la satire politique ( Network , Lumet, 1976) ou nostalgique ( Ginger et Fred , Fellini, 1986) et le thriller métaphysique ( Vidéodrome , Cronenberg, 1983). Plus cathodique que catholique, Late Night with the Devil (Cameron & Colin Cairnes, 2024) retravaille le motif des archives maudites, en particul...

Le Vol du grand Edwin

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  Exils # 56 (18/10/2024) Trois titres, trois trains, trois tons : A Romance of the Rail , The Great Train Robbery , What Happened in the Tunnel , tous trois de 1903, savent conserver leur vitalité, manient le matte et l’humour, persistent à dire quelque chose de peu morose des États-(dés)Unis d’aujourd’hui. Dans le premier, un couple impeccable papote sur un quai déserté, ensoleillé, embarque, regarde et parle du paysage, même ici se marie, merci au cordial curé lui-même immaculé. In extremis , deux types descendent aussi, mais DE DESSOUS la machine, chapeautés, époussetés, clochards en costards. Dans le deuxième, très célèbre, une bande violente détrousse un chœur de voyageurs et se fait fissa flinguer en forêt, bien mal acquis – fichu fric – en effet ne profite. Dans le troisième, le plus court, d’actualité toujours, en tout cas du côté de la « racialité », de la « sororité », mots « marqueurs » de notre époque, deux jeunes femmes profiten...

Ne vois-tu rien venir ?

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  Exils # 55 (14/10/2024) Film funèbre, au Montand émouvant, Un soir, un train (Delvaux, 1968) se termine comme commence Les Mains d’Orlac de Maurice Renard, par un déraillement, des victimes et des survivants. Le dernier plan, en plongée, allongés, reprend presque l’identique et fatidique d’un souvenir, d’un rêve ou d’un fantasme. Comme chez Hitchcock ( The Lady Vanishes , 1938), une femme disparaît ; comme chez Roeg ( Ne vous retournez pas , 1973), voilà déjà un couple en déroute, dans un décor de mort ; comme chez Tarkovski ( Stalker , 1979), trois hommes marchent au milieu d’un mental no man’s land . Moins drolatique mais autant rempli de néant que le compatriotique Malpertuis (Kümel, 1971), remarquez le point commun de Jean Ray cité parmi la parenthèse anglaise, cette odyssée immobile donne à entendre en sourdine l’agitation estudiantine, ici doublée, Belgique oblige, d’une dimension linguistique, sinon xénophobe. Entre présent et passé, mains jointes et visages...

Le Culte et l’Occulte

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  Exils # 54 (10/10/2024) Aussi suicidaire mais moins « suicidé de la société » que le pauvre van Gogh, James Whale s’intéressait aux « dieux » et aux « monstres », cf. une réplique emblématique de La Fiancée de Frankenstein (1935). Alors âgé d’une trentaine d’années, Antonin Artaud se soucie de « sorciers » et de « saints », selon une sorte de note d’intention écrite à l’époque de La Coquille et le Clergyman (1928), vaudeville anecdotique et pseudo-cryptique dont le scénariste se désolidarise vite, dommage pour Germaine Dulac et sa « composition visuelle » très patraque, conspuée en sus dès sa sortie par les susceptibles surréalistes. Né un an après la date de naissance officielle du « cinématographe », leur rencontre se place cependant sous le signe du rendez-vous loupé, en dépit d’apparitions assez impressionnantes chez Gance ( Napoléon , 1927), Dreyer ( La Passion de Jeanne d’Arc , 1928), L’Herbier ( L’Arge...

Le Méchant Photographe

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  Exils # 53 (03/10/2024) Connu du lectorat des anciens Cahiers du cinéma , dorénavant président de la Fondation Cartier-Bresson, Serge Toubiana introduit un bel album composé d’environ une bonne centaine de reproductions et assorti de quatre essais, dont celui du directeur de l’ opus et de l’organisme précité, le spécialiste Clément Chéroux. Tandis que les dames (Isabelle Bonnet & Cynthia Young) se soucient d’archives, de « scène de crime », de « presse tabloïde », d’ascendance (Daumier), de descendance (Cindy Sherman), les messieurs (David Campany en prime) désirent résoudre « l’énigme Weegee » ou retracent le rôle de « The Famous » sur le tournage de Docteur Folamour . « Il fotografo cattivo », tel l’appelle la presse italienne, en effet se piqua un peu de cinéma, effectua un caméo chronométré dans le dégraissé Nous avons gagné ce soir , apprécia Lolita et Les Sentiers de la gloire , assure-t-il à Peter Sellers qui lui e...