Thérèse Desqueyroux
Un métrage, une image : Thérèse Raquin (1953)
Filmé de façon académique, car Carné
en pilotage automatique, cette adaptation presque pirate, due à l’impeccable
Spaak, du gros mélo du moralisateur Mimile, lui-même a priori traumatisé par Le Chat noir de Poe, ne s’avère vite
« un grand film », n’en déplaise au fidèle André Bazin, tant pis pour
le prix vénitien, démontre donc les limites anémiques d’une « tradition de
la qualité » bientôt malmenée, fiasco selon Truffaut. Si la forme morne
pourrait matérialiser l’asphyxie du récit, elle invite avant tout à respirer
l’air de l’extérieur, du mouvement, de la vitalité, Nouvelle Vague ou non.
Simone Signoret traverse en somnambule, guère concernée, visage fermé, une
histoire de (roman de) gare, un vaudeville dramatique, interminable et
néanmoins à la va-vite, où la fatalité, surtout motorisée, se substitue à la
culpabilité, aux fantômes et fantasmes d’un couple illico, en duo, suicidé. Le cinéaste ne (nous) se passionne de la
passion, majuscule optionnelle, remarquez le maître-chanteur amateur martyrisé,
bras en croix porté, en rime au mari alcoolisé, jamais n’érotise sa Thérèse mal
à l’aise, échoue à capturer la chaleur des corps aimantés, au déterminisme de
damnés. Avec sa boucle bouclée de premier puis dernier plan s’équivalant, panorama urbain indifférent,
cristallisation concon d’immobilisme, de tour de vis, d’express justice, puisque postale délatrice + sirène de police, la
transposition pasteurisée, empesée, rendrait quasiment intéressant l’assez
insipide Thirst, ceci est mon sang (Chan-wook, 2009), encore une
relecture délocalisée, à morsure différenciée. Si la sidérante Sylvie se situe
aussi à la périphérie, le cœur de l’opus
palpite ailleurs, du côté d’un homoérotisme discret, assumé. Tout sauf le portrait
d’une femme, actrice, protagoniste, Thérèse Raquin devient devant la
caméra du « cinéma de papa » du gay
Carné un item bel et bien masculin,
parce qu’ils le valent bien, Duby, Lesaffre, Vallone, sorry pour Simone. Grâce à ces hommes en disgrâce, ni héros, ni
salauds, le détournement s’anime, une tragédie « genrée » se dessine,
à base d’infantilisme, de racisme, de sincérité, d’adversité, d’impuissance, de
malchance. Réponse à distance au supérieur Dédée d’Anvers (Allégret, 1948), il
ne s’apprécie qu’ainsi, en catimini…
https://www.programme.tv/news/cinema/212147-therese-raquin-arte-pourquoi-simone-signoret-ne-voulait-pas-tourner-ce-film/
RépondreSupprimerD'une Simone à la seconde :
Supprimerhttps://lemiroirdesfantomes.blogspot.com/2020/03/les-chemins-de-la-haute-ville-simone.html